L’épisode de la naissance est toujours magique, autant que douloureux pour la femme et éprouvant pour son mari, copain ou autre parce que ça a toujours été ainsi et ça le sera toujours. Le mien a simplement été un peu plus surprenant que les autres, vous savez, ce n’est pas tous les jours que les gens ont droit à ce genre de naissance et c’est assez cocasse. Tout portait à croire que je serais une fille, enfin officiellement mais le choc arriva bien vite lorsque finalement je sortis du ventre de ma mère, né sans sexe ou avec les deux comme vous préférez le définir. Naitre hermaphrodite est une torture pour les parents, un choix bien difficile à porter et faire, surtout que bon, autant ils peuvent se manquer sur le choix du sexe de leur enfant. Ils m’ont raconté qu’ils étaient perdus à l’époque et que du coup ils ont laissé passer quelques heures avant de finalement prendre la plus grosse décision de leur vie et je pense que je n’aurais jamais à en prendre une comme ça. Surtout vu le traitement que ça implique pour certaine personne, mais dans mon malheur j’ai peut-être eu un peu de chance… Ou peut-être pas en fait. J’ai donc grandit avec le sexe que mes parents m’ont choisi et les « n’oublie pas de prendre tes vitamines ! » et c’était tout le temps comme ça mais ça ne me dérangeait pas parce que j’obéissais comme n’importe quel enfant l’aurait fait… Je suppose. Puis est venu le temps de grandir, d’aller à l’école et d’affronter le monde cruel des enfants et de la communauté. C’est plus ou moins facile en fonction des personnalités et pour moi, ce fut une expérience normale si ce n’est les questions parfois sur le fait que je devais tout le temps prendre mes médicaments… D’autant plus que c’était normal pour moi et que je ne pouvais pas l’expliquer, donc je disais toujours que c’était mes vitamines. Ce n’est que plus tard que j’ai compris que non, un traitement hormonal, voilà ce que c’était et du coup j’ai commencé à me sentir perdu. Je me demandais pourquoi est ce que moi je devais avoir ça et pas les autres.

Je n’osais cependant pas demander à mes parents jusqu’à me lancer finalement un jour où je me sentais vraiment mal par rapport à moi-même, début de l’adolescence en fait parce qu’il y avait plein de choses que je ne comprenais pas ou pas plus que ça. Finalement ma mère ne m’a pas répondu de suite et je n’en ai eu qu’un sentiment de frustration intense avant que finalement elle ne m’appelle un soir avant que je n’aille me coucher. Quel autre choix avais-je que de descendre ? Même si je n’en avais pas envie, je l’ai fait et je me suis assis docilement sur le fauteuil en face d’eux et j’ai écouté. Ce qu’ils avaient à me dire n’était pas facile pour eux, je l’ai senti, entendu dans l’intonation de leurs voix quand ils se passaient la parole, anxieux ? Oui, ils l’étaient mais je ne sais pas comment, je les ais rassuré lorsque j’ai dit que je comprenais mieux maintenant. Si j’étais en colère ? Non, perturbé oui car ce ne sont pas des choses faciles à entendre, pas du tout même mais c’était ainsi et ils n’ont fait que répondre à mes questions. J’ai pris congé et je suis allé me coucher ce soir là sans arriver à dormir, le reste de la semaine je ne leur ai pas non plus trop adressé la parole, pensant juste à ma vie et surtout à ce que ma naissance pouvait engendrer. Alors je ne serais jamais totalement ce que je suis, voilà ce que je pensais à l’époque. Si j’en ai ressenti de la colère envers mes parents et les médecins qui ont pris en charge mes opérations lorsque j’étais petit sans que je ne m’en rende compte ? Non, finalement maintenant que j’en étais là je me disais que je n’avais qu’à continuer parce qu’après une longue « introspection » j’en ai conclu que c’était vraiment le bon choix et que dans le cas contraire je me serais senti mal dans ma peau alors que là je me sentais parfaitement bien.

Finalement le temps a passé, lentement et en douceur si on veut, je suis en paix avec moi-même mais ça ne veut pas pour autant dire que je parle de ce que je suis aux gens, ils n’ont pas besoin de le savoir. Bien évidemment que j’ai eu des relations, des histoires mais trop courtes pour dévoiler quoi que ce soit. De toute façon, dans ma tête à un moment, comme tout autre jeune, je voulais juste m’amuser et il n’y a eu aucun mal à le faire, j’assume de ne jamais avoir voulu d’histoires sérieuses même si j’ai eu des coups de cœur parfois. Bon, ce n’est pas tellement ce qui intéresse dans ma vie, enfin si, ça intéresse les curieux mais cela est secondaire. Pour ce qui concerne mes études, j’en ai fait, bien évidemment et des sérieuse, en vérité je suis un peu touche à tout et de ce fait j’ai fait plusieurs branches, les études générales au départ comme tout le monde puis je me suis spécialisé en stylisme dans un premier temps parce que j’ai toujours voulu en faire mon métier, créer de beaux vêtements et tout ça. Puis ensuite la photographie comme d’une simple passion, c’est devenu un véritable petit lot quotidien, prendre tout et n’importe quoi en photo du moment que ça me tapait dans l’œil. Bon, j’ai essayé de vivre du stylisme, au départ je travaillais pour des petites marques de vêtements avant de finalement décider que ce n’était pas pour moi, trop de contraintes. Depuis, je suis à mon compte et je fais tout, c’est prenant, ça ne laisse pas beaucoup de place à la vie privée mais j’aime ma vie.