Je ne savais pas pourquoi il fallait que ça m'arrive maintenant. Dans ma tête, je n'avais pas imaginé rencontrer d'obstacles. Mon plan sans accroc avait en fait une faille ? Si je m'éternisais devant ce distributeur rempli de preuves compromettantes, j'allais me faire taper sur les doigts avec la règle aiguisée de Manager Hyung. Et aussi étrange cela puisse paraître, je n'avais pas spécialement envie que ça arrive.

. . . .
Non en fait, je plaisante, c'est normal.

Hyung pouvait vraiment être effrayant lorsqu'il me disputait. Je savais que c'était pour mon bien, mais vraiment il y allait fort parfois. Je ne souhaitais ça à personne, pas même à cette jeune fille à visage humain, mais à estomac sans fond comme le sac de Mary Poppins. Mais au moins, ça nous faisait un point commun, j'espérais cependant qu'elle ne tombait pas malade aussi aisément que moi, sinon elle était mal barrée. Quoi que je voyais bien Nathanaël hyung venir à son secours à elle aussi.

Nathanaël hyung aka my hero. (quand je serais grand, je serais comme lui.)

Je l'observais manger deux gros marshmallow dans un silence des plus admiratif. Elle ressemblait d'un coup à un petit hamster. A cette pensée, un sourire étira doucement les commissures de mes lèvres, tandis que j'étouffais un rire. « … MAH MAH ! Garde ta barre va ! Ch’ai achez de bonbons… Et exchusche moi… » Cette fois s'en était trop, je riais. Et tout en passant une main dans mes cheveux, je lui répondais dans un premier temps par un sourire, avant de lui dire : « Ce n'est rien, je peux comprendre ton intérêt portée à cette barre. Le chocolat, c'est tellement... Je regardais la barre que j'avais dans les mains et finissais par hausser les épaules, en croquant un morceau : Il ne faudra pas regretter alors !  » En plus, le chocolat commençait à fondre sur mes doigts, donc tout en écoutant ce qu'elle avait à dire, je plaçais mes doigts chacun leurs tours, dans ma bouche.

Eh quoi ? Je ne vais pas gâcher quand même.

« Je n’avais pas eu envie de te faire peur… Pardon. Et puis c’est pas très poli de ma part de… vouloir voler la bouffe des autres… Encore pardon » Je tendais la main vers elle, et la secouais, pour lui dire que ce n'était pas la peine de se répandre en excuse. « Ce n'est rien, vraiment !  » Disais-je en riant un peu. Puis juste après, mon regard se baissait sur le bonbon qu'elle me présentait. Je fis la moue, comme si elle venait de me présenter un chèque de 100 000 won, et que je ne pouvais accepter. «T’en veux ? » Je reportais mon attention sur elle, tandis que mes yeux tournaient étoiles, sans me faire prier je prenais ce qu'elle me présentait : « Gh'amsa! » Disais-je en souriant, et en finissant par avaler. « Ravie de pouvoir te rencontrer Dongie ! » Je m'inclinais une fois, et hochais la tête doucement, après tout, elle était mon aînée ! « Moi de même !  » Même si elle paraissait moins, je lui devais le respect, donc. Et puis j'étais bien élevé. *-*

Je ne demandais qu'à être aimé en fait.
… Oui d'accord, je sors.

« Moi ? Nan. Pas vraiment. Disons plutôt que l’on essaie de m’interdire les bonbecs, mais que si je ne mange pas de sucre… Je deviens encore plus ennuyante que si j’en mange… Alors... On évite de me forcer manger des légumes… » Je faisais la moue, et soupirais. Les légumes... C'était tellement.... traître. Je comprenais parfaitement ce qu'elle voulait dire. Sauf que moi, ennuyant ou pas, quand Hyung disait non, je ne pouvais plus rien y faire. «OH MON DIEU ! » Je sursautais violemment en sortant de mes pensées, posant sur elle des yeux médusés. « Gw.. Gwenchana ?  » Demandais-je un peu inquiet. « On ne t’empêcherait pas toi aussi d’en manger quand même ??! »  Ma bouche s'entrouvrit doucement, et un long 'aaaaaah' sortit de ma bouche. Puis alors que je terminais ma barre chocolatée :

« Ben si ! Tu vois ! Je ne peux cuisiner que quand je suis tout seul, et en plus ça ne mène jamais à rien. Si Hyung acceptait de m'acheter des sucreries un peu plus souvent, ce serait si... bien !  » Disais-je en joignant mes mains devant moi, et en regardant le plafond, comme si là-bas s'y trouvait mon salut. Je finissais par reposer mon attention sur elle « Tu aimes les cookies ?  »

Logique ? Inexistante.
Il ne faut surtout pas essayer de me comprendre quand je suis parti pour parler nourriture.

Être réveillé par Godziel (astucieux mélange de Gabriel et Godzilla, trouvé par mes soins) qui descend les escaliers ou rester éveillé pour lui passer un savon. Jusqu’il y a peu, je pensais que mes choix se limiteraient à ça. Oui, jusqu’à ce fameux matin ou nous avons décidé de discuter un peu pour convenir d’un terrain d’entente. Aussi étonnant cela puisse paraître, le courant est plutôt bien passé. Ce qui m’a encouragé à essayer de me montrer plus sympa à son égard, ou tout du moins, moins dure. C’est déjà ça de gagné, me direz-vous ! Et j’étais prêt à continuer à faire des petits pas en sa direction pour que notre cohabitation continue à bien se passer. De même pour lui ; il m’avait esquissé un planning de ses semaines pour que j’évite de l’engueuler s’il ne rentrait pas, et pour que l’on puisse convenir de matinées ou je pourrais dormir tranquillement sans être éveillé par sa légèreté pachydermique. Je me complaisais dans cet accord, et ça faisait déjà une bonne semaine que tout se déroulait plutôt bien – pour la première fois depuis son arrivée en Corée. Pourtant, il faut croire que ce garçon ne cessera jamais de m’étonner, mais surtout, de m’énerver prodigieusement.

Moi qui me réjouissais de pouvoir me prélasser au lit un peu plus longtemps qu’à l’habitude, j’étais agréablement surpris de ne pas entendre Gabriel faire tout son refus. Et pourtant, c’est bien lui qui me tire du lit, une fois encore… Un coup de fil. Un certain Ryu au bout du fil m’indiqua que mon cadet se trouvait à l’hôpital. Surpris, je rétorquai que c’était impossible, ce dernier se trouvant dans sa chambre. L’autre me contredit, tandis que j’entrai en trombe dans la chambre de Gabriel, déserte. Inspirant profondément pour me calmer, je répondis que j’allais à l’hôpital de ce pas, et raccrochai aussi tôt. Je fonçais pour me préparer rapidement, avant de sortir de la maison en trombe, direction l’hôpital.

D’un pas rapide, sans pour autant courir, j’avance sûrement vers l’imposante bâtisse. En l’occurrence, impossible de dire ce qui m’énerve le plus. Est-ce de m’être malgré tout fait réveillé par Gabriel ? De devoir renoncer à quelques minutes de repos en plus ? Ou de savoir que mon cadet me fait des cachoteries malgré notre précédente entente ? Même si je sens clairement ma mâchoire se crisper sous l’effet de la colère, je sens pourtant un nœud serrer mon estomac. Inutile de le cacher ; même si nous ne sommes pas encore vraiment proches, je me suis juré de faire plus attention à lui. De fait, mon inquiétude est toute légitime, surtout que selon ce Ryu que j’avais eu au téléphone, Gabriel est blessé. D’où le fait qu’il soit à l’hôpital. J’en connais un qui va se prendre un savon mémorable…

J’entre finalement dans le hall principal, et me dirige vers l’accueil. J’explique à peine que je viens chercher Summer Gabriel, que l’intéressé montre le bout du nez, un grand sourire insouciant aux lèvres. Je le foudroie du regard avant de remercier poliment le personnel de s’être occupé de lui. Je ne réponds pas à ses salutations, le tirant par la manche vers l’extérieur pour éviter de péter un câble en public. Une fois à l’extérieur, il me présente des excuses avant de me proposer de me payer un quelque chose à manger. Tout feu flamme, je m’écris en lui collant une frappe sèche sur l’arrière de la tête ; « Bordel ! Tu penses que je suis d’humeur à manger là, Gabriel ? » Oui, je suis vraiment en colère. Exaspération décuplée par une inquiétude que je ne veux pas avouer pour l’instant. Je poursuis sur un ton grondant, montrant son bras ; « Qu’est-ce que t’as foutu ? T’étais où cette nuit ? Tu te souviens pas m’avoir dit que tu me le signalerais quand tu sortirais ? T’étonne pas si je viens t’engueuler après ! » … Au secours, j’ai vraiment l’impression d’être un frère poule.

Hye Sung se tortille comme un limaçon sous les chatouilles que je lui octroie en guise de vengeance. Qui sème le vent, récolte la tempête, comme l’on dit ! Ou alors, la vengeance est un plat qui se mange froid… Là, c’est le cas de de dire, vu qu’on est tous les deux étalés sur la glace comme deux gosses que nous sommes. Bref, trop de dictons au sujet de la rancune, qui décidemment ne me correspondent pas. Je ne suis pas rancunier, juste un plaisantin de première qui aime faire des conneries dès qu’il en a l’occasion. Autant dire que je joue de mon naturel farceur pour en remettre certains à leur place quand le temps en est venu. Original Prankster, OP, tel est mon nom. Faut croire que je porte vraiment bien mon nom de scène ! Enfin, j’accorde enfin répit à ma victime, retirant mes mains. Je voudrais quand même pas que mon meilleur pote me claque entre les pattes, et à le voir rire comme un fou, je crains qu’il perde son souffle. Je lui offre un large sourire avant de me redresser pour de bon et patiner tranquillement aux alentours tout en le regardant se relever à son tour. Les gens continuent à nous regarder comme si on était des échappés, et c’est par un sourire innocent et un petit haussement d’épaules que je réponds à leurs regards désemparés. Décidemment, oui. Il n’y a qu’avec Hye Sung que je peux déconner autant, et surtout sans avoir à me soucier du regard des autres, ce qui n’est pas le cas avec chacune de mes connaissances. En tout cas, je suis surpris que des vigiles ou des responsables ne soient pas venus nous prendre par la peau des fesses pour nous jeter à la porte. En tout cas, cette simple image digne d’un cartoon n’aurait fait qu’en ajouter à notre hilarité ! Mon sourire s’élargit à cette pensée, me donnant sûrement un air d’imbécile heureux. Mais peu importe, puisque c’est précisément ce que je suis, selon moi.

Bref. Mon ami me rejoint pour me proposer d’aller nous poser devant une petite collation. J’acquiesce vivement avant de rejoindre le bord de la piste, où je me réchauffe les mains transies par le froid. Je vais attendre patiemment Hye Sung à une table, le temps qu’il ne revienne. Il ne tarde d’ailleurs pas à rappliquer, mains chargées d’un plateau ou s’entassent boissons chaudes et autres friandises qui me mettent l’eau à la bouche. DU SUCRE, hiiiih. Le plateau est tout juste posé sur la table que je ne me fais pas prié, je saisis un muffin dont j’engouffre une bonne bouchée, mon cadet me souhaitant le bon appétit. Un peu gêné de mon flagrant manque de patience, je m’empresse d’avaler ma bouchée, qui a un peu de mal à passer… Je manque de m’étouffer, mais sitôt dit, sitôt fait, je viens arroser le tout d’une gorgée de chocolat, malheureusement trop chaud. Je tousse un peu mais reprend mon souffle pour finalement ; « Hahem. Merci pour les boissons et les friandises, Padawan ! Bon appétit à toi aussi. » dis-je avec un sourire. Oui, Padawan. Je suis bien parti pour l’appeler comme ça pour le reste de la journée. Pour une fois que quelqu’un est plus jeune que moi, j’ai bien le droit non ?

Je me fais moins glouton et tâche de manger plus lentement, profitant de chaque bouchée. Mais bientôt, je reprends la parole pour engager la conversation ; « Mais oui, c’était cool, faudra qu’on remette ça ! » Gorgée de chocolat, avant de poursuivre ; « Faudra voir si on peut emmener les hyungs aussi. Je donnerais cher pour voir Seung Joo et Dong Jung sur des patins, je crois ! Puis ça serait tentant de leur coller la honte, ou de faire les zouaves devant eux, tu ne trouves pas ? » Et là, ils n’auraient pas matière à nous réprimander en plus, vu qu’on est dans le cadre non professionnel. Je termine rapidement mon muffin avant de regarder silencieusement Hye Sung. Mais j’ai bien vite fait de reprendre la parole ; « Bon sinon ! Parles moi de ta vie. Pour une fois qu’on a l’occasion de se voir en dehors de l’agence sans avoir le staff sur le dos ! »

Pour être honnête, j'étais un peu désorienté. Je n'avais pas l'habitude que les événements tournent si mal. Depuis l'incident de Rin Ah, c'était la première fois que je voyais la mort de si près. J'avais encore du mal à me dire qu'il y a un peu moins d'une heure, j'avais le canon d'une arme pointé sur moi. La brûlure causée par la poudre, que j'avais à mon bras, faisait office de rappel à l'ordre. Comme quoi, rien ne m'affirmait que c'était bel et bien terminé. Et ce fait piquait ma nervosité à vif. J'espérais juste que ces enfoirés n'en savaient pas trop long sur mes proches. Si ils avaient le malheur de les approcher, je les retrouverais, et pas de doute à avoir seul ou avec mes hommes, c'est eux qui connaîtraient la peur de mourir. Je ne tuais que lorsque je jugeais cela nécessaire, là était peut-être mon erreur. Mais il n'y avait pas de raison plus valable que celle-ci à mes yeux :

La sécurité de l'un de mes proches est en jeu ?
Plus de Xia Min qui tienne, jusqu'à ce que la menace soit de l'histoire ancienne.
Je cherchais toujours ceux qui avaient fait du mal à Rin Ah, et l'incident remontait à deux ans.
Pour vous dire à quel point ma rancune et ma vengeance pouvaient être sévère, et ne connaissaient pas la fatigue du temps.

Malgré les choix que j'avais pu faire dans ma vie, j'osais croire que je n'étais pas foncièrement mauvais. La seule chose était que je ne me voyais pas sortir de ce monde de l'ombre. A force, j'y avais pris mes marques, et ce qui était sûrement le plus triste là-dedans, était que je ne savais rien faire d'autre. Je n'avais pas eu le temps de songer à une vie.
Alors si je me mettais même à prendre des risques inutiles ainsi, et que j'en devenais incompétent, que dirait mon père ?
Enfin pour le moment, je n'avais pas le temps de penser à ça. Vu ce qui s'était passé ce soir, et la venue inattendue de Ryu, il y avait de toutes évidences, certains points à éclairer. De son côté, comme du mien. « Je comprends mieux… La surprise est partagée.. Mais, tu te trompes.. Cela fait une année que je n’avais plus tué. Je suis détaché de tout ça… Du moins… Je le croyais jusque-là..» Bah ça... Le terme de «rouillé» ne semblait pas être de mise le concernant, et heureusement vous me direz. Je plissais doucement les yeux, en sa direction, un peu confus.

« Eh bien... On dira que tu n'as juste pas perdu tes réflexes hein. » Je n'aimais pas l'idée d'être redevable à quelqu'un, traîner de vieux comptes derrière moi... J'en avais déjà assez comme ça. Mais avec Ryu, c'était différent.

Je crois.

«Merci de t’être inquiété pour ma sécurité… Quant à mon « ami » je lui ferais parvenir… Et, j’aimerais en effet que tu restes loin de cet homme. Pour ta sécurité. Cet homme… est différent de nous… » Je croisais les bras sur mon torse, laissant tomber ma tête en arrière, me demandant qui pouvait avoir autant de relation que ça, pour avoir été au courant qu'on prévoyait de me descendre ce soir. C'était effrayant, oui voilà. Effrayant. Mon père était parti sans me laisser de manuel pour continuer sans lui, j'avais dû apprendre sur le tas, et j'avais l'impression que plus j'avançais, plus je m'enfonçais dans quelque-chose dont je n'arriverais plus à sortir. C'était assez frustrant d'avoir si peu d'emprise sur sa propre vie.

« Hm... Ne t'en fais pas, contrairement à ce qu'on pourrait croire avec ce qui s'est passé ce soir : je ne cherche pas à mourir. Comme je te l'ai dis, avant ça j'ai des comptes à régler. Donc je ne m'en approcherais pas. » Ou peut-être que c'était lui qui m'avait déjà approché ? Qu'est-ce que j'en savais après tout ? Ryu n'avait pas mentionné de nom, donc je ne pouvais rien faire à part redoubler de vigilance.

Il y aurait tellement de questions que j'aimerais poser, mais je m'imposais le silence, jugeant cela préférable, vu la situation. Un frisson me mordit l'échine, me faisant grimacer légèrement. Je soupirais, doucement, tout en continuant de surveiller Mei Jin du coin de l'oeil. J'étais conscient du fait qu'il avait déjà perdu beaucoup de sang, mais j'osais espérer qu'il était hors de danger. Lui non plus n'avait pas le droit de mourir. Il était le plus apte à reprendre les affaires de la boîte, si quelque-chose venait à m'arriver. Jamais je n'imposerais la succession à Yi Xing de toute façon. « On est en sécurité ici. Ces personnes viennent de ce milieu, ta voiture n’existera plus si, elle n’y est plus déjà. Cependant.. Pour revenir à ta question première… C’est possible que ceux qui sont véritablement visés soient les gens pour qui tu travailles dont j’aimerais savoir leur identité pour t’aider..» Je posais de nouveau mes yeux sur lui, assimilant ses paroles, et encaissant le fait que Jia Li avait raison. Si même Ryu le pensait. On essayait de m'atteindre pour faire tomber leurs clan.

C'était bien ma veine tient. « Je ne sais pas vraiment si c'est une bonne chose que je te le dise. Mais bon, si ça se trouve... Enfin, c'est la triade Sun Yee On. Je n'avais pas idée de leurs existence jusqu'à il y a quelques semaines de ça. Il semblerait que mon père ne m'ait pas tout détaillé avant de mourir. » Non, je ne lui en voulais pas. J'étais juste un peu perdu. J'étais quelqu'un qui aimait avoir le contrôle sur les événements, que tout soit calculé au centimètre près.

Foncé tête baissée... Si j'étais devenu un peu trop impulsif, ça datait de ce fameux soir, c'est tout.

Quand je demande à Cally si ce cher Nathanaël ne serait pas jaloux à propos de cette pseudo-relation que nous avons toutes les deux, cette dernière est radicale ; non. C’est sûr, je ne connais pas très le jeune Jung. Tout du moins, pas assez pour dire si ça peut-être dans sa nature d’être jaloux. Mais j’avoue que c’est un concept que j’ai du mal à imaginer. Mais bon… Ça aurait pu être une solution, non ? Donc bon, je ne m’attarde pas sur le sujet. Peut-être qu’en fait, il n’y a pas de raisons pour qu’ils se prennent toujours le chou ; peut-être qu’ils ne peuvent pas se supporter, tout bonnement. Pas besoin de chercher de sombres et obscures raisons sous-jacentes propres à l’inconscient, ou des trucs dans le genre. De toute façon, moi et la psychanalyse, bof. Ça m’amuse des fois de me torturer l’esprit avec des raisonnements très alambiqués, mais là… Bref, c’est comme ça et pas autrement, et des fois faut juste arrêter de se prendre le chou. Sinon, la remarque qu’ajoute Calliope me fait doucement sourire en silence.

Nouvelle gorgée, mes yeux plongent au fond de la tasse, pensant que nous sommes arrivées au bout de la conversation. C’est vrai non ? Ils ne peuvent pas se voir en peinture, donc autant qu’ils arrêtent de se voir, non ? Ma simplicité m’épate, mais en même temps, il me semble qu’ils ne peuvent pas adopter d’autre solution. On ne peut pas faire cohabiter l’eau et le feu, si je veux faire dans la métaphore. Et tandis que je suis concentrée sur le fond de ma tasse, avalant les dernières gorgées de café, je relève les yeux quand Calliope reprend la parole, un peu hésitante. Je m’imagine que ce qu’elle veut me demander ou me dire ne peut pas être aussi important que ce qu’elle m’a déjà dit. Ça ferait trop de déclarations en une soirée pour mon pauvre cerveau endormi, un peu embrumé par le café et la cigarette. Et pourtant, et pourtant… J’ai beau être moyennement attentive au début, le regard fixé sur ma tasse, mes yeux reviennent soudainement sur Calliope quand elle termine de parler. « Hein ? » est le seul mot que j’arrive à dire. Pas que je n’ai pas entendu, ou pas écouté ; je ne suis pas absorbée par le fond de ma tasse à ce point-là. Mais est ce que j’ai bien entendu ce que j’ai entendu ? Est-ce que je suis censée comprendre que… ? Non. Non… HA MAIS NON, QUOI ! Enfin, je veux dire, Cally en pince pour qui elle veut, je serai heureuse pour elle si ça peut marcher. Oui parce que bon, vu ce qu’elle me dit, je pense que c’est pas trop la peine de s’illusionner. Mais de Nathanaël ! Oui alors là, c’est clairement la peine de faire une psychanalyse et tout le bazar. Mais pour l’instant, je suis en mode trop étonnée pour entreprendre des questions pour décortiquer l’esprit de mon amie. Ma tasse est claquée brusquement sur la table, vide, tandis que mon regard écarquillé reste posé sur mon amie, ma bouche un peu entrouverte. Je lâche un petit rire, en cherchant un quelconque petit indice sur le visage de mon amie qui trahirait une plaisanterie. Mais mon petit rire passe sûrement pour un tic nerveux, alors je redeviens sérieuse ; « Non, mais… Sérieux ? »

Je continue à la regarder, cette même mine au visage. Si Cally se paye ma tête, j’avoue qu’elle est vraiment super convaincante. Une excellente actrice même, elle aurait carrément raté sa vocation de comédienne. Mais bon, connaissant mon amie comme je la connais, je ne pense pas qu’elle plaisante, surtout sur un sujet aussi sérieux. Surtout qu’elle a l’air vraiment gênée de me faire cet aveu. « Hoh. Merde. » Oui, c’est tout ce que je suis capable de dire pour l’instant. Je suis vraiment constructive quand je m’y mets. Mais il y a tellement de trucs qui me passent à l’esprit là, des questions, des interprétations foireuses, et tout ça… J’aurais presque l’impression d’être dans une série télévisée. Oui, je sais, ça paraît terriblement cliché, mais bon. Je tâche de me ressaisir, et je demande alors ; « Mais alors… Tu craques pour Nath’, en fait ? » je demande avec un petit sourire amusé, mais pas moqueur pour un sou.