C'est le 1er décembre 1987 que Choi Bi Ah ouvrit ses yeux pour la première fois et ce, dans un lieu improbable pour une sud-coréenne. En effet, la petite fille est née à Barcelone où sa mère travaillait et travaille toujours. Il n'était pas prévu que l'enfant y naisse mais le bébé est arrivé un mois plus tôt et il n'était pas possible de faire autrement. Néanmoins, Bi Ah pu obtenir la nationalité de la jeune maman, qui en profita pour ajouter à celle-ci la nationalité espagnole, certainement semblable à celle de son père biologique. La demoiselle n'a pas de « papa » à proprement dit, puisque sa mère, désireuse d'avoir un enfant mais ne trouvant pas l'homme idéal, eut recours alors au don du sperme et voilà comment Bi Ah fut conçue. Mais elle fut chérie comme le plus beau trésor que la nature ait offert à sa maman et elle resta longtemps sa petite princesse adorée, qui émerveillait tout le monde seulement en souriant. Bi Ah était de nature sage et posée, le bébé que tout le monde rêverait d'avoir, même s'il lui arrivait d'avoir ses gros chagrins, comme lorsque Mademoiselle Choi devait l'amener chez une nounou. Elle était en bonne santé et mignonne comme tout, tout allait pour le mieux du monde, bien que la maman ne puisse pas voir plus souvent sa fille à cause de son emploi de journaliste qui lui prenait beaucoup de temps.

En fait, la mère de Bi Ah en vint même à penser qu'il n'était pas bon pour sa fille d'être emmenée d'un endroit à un autre et qu'elle en serait psychologiquement affectée si cela continuait. C'est entre autre le discours que lui a tenu une enseignante de l'école maternelle et, afin de ne pas se comporter en « mère irresponsable », elle dut trouver une solution pour le bien de son enfant. A contre-cœur, elle se résolut donc à confier définitivement la petite de cinq ans aux grands-parents de cette dernière, qui vivaient toujours en Corée du Sud, à Séoul. Heureusement, ils avaient une situation assez aisée pour accueillir Bi Ah et ils refusèrent même toute contribution financière de leur fille : c'était déjà assez difficile pour elle, ils ne voulaient pas lui causer plus de souci. A vrai dire, leur petite-fille mettait du bonheur et du mouvement dans leur vie qui commençait à leur sembler monotone : c'était comme si ils avaient un nouvel enfant et dès lors, ils traitèrent l'enfant comme si elle était la leur. Mais dans sa tête, Bi Ah savait qu'elle n'était pas chez elle, et sa mère lui manquait toujours autant, au point que ses grands-parents en devinrent jaloux. Leur possessivité devint alors presque effrayante et c'était à peine si elle pouvait avoir des nouvelles de sa maman. Les fêtes de Noël, de Pâques et les anniversaires devinrent alors les moments les plus heureux de sa vie car elle retrouvait celle qui comptait le plus pour elle.

Mais Bi Ah ne tarda pas à être malade de cette ambiance malsaine qui avait à la maison. Elle appréciait ses grands-parents mais de son point de vue, ils n'avaient pas à jouer aux « parents » comme ça à l'improviste, et même si elle ne savait rien de son père, elle ne supportait pas qu'ils essaient de constituer le tableau de « famille modèle », dont elle n'avait strictement rien à faire. Il fallait sauver les apparences, voilà le prétexte qu'ils lui sortaient, car soit-disant, en Corée du Sud, leur situation serait mal vue. Vers ses treize ans, Bi Ah se mit donc à fuir cette maison où elle ne sentait pas chez elle, où elle n'avait même plus envie de revenir. Elle traîna avec les jeunes de son quartier et décida d'elle-même de faire percer ses oreilles, même si elle savait que « les vieux », comme elle les appelait, n'approuverait pas. Elle se mit même à fumer pour se détendre et oublier ces soucis qui la tracassaient. Et même s'ils râlaient, elle s'en fichait, complètement. La petite poupée disparut alors et ce fut l'ado rebelle incontrôlable qui la remplaça. Ils ne pouvaient plus la voir sans tirer une grimace et poussait des soupirs pour signifier qu'ils avaient honte. Cela n'empêcha même pas la jeune fille d'aller chez le coiffeur et se faire couper les cheveux à la garçonne : c'étaient ses cheveux après tout, elle était libre d'en faire ce qu'elle voulait. Là où sa mère lui dit que ça la changeait et que c'était joli, ses grands-parents lui lancèrent que bientôt on ne ferait plus la différence entre elle et les garçons. Bi Ah joua l'indifférence une fois de plus.

Un jour, Bi Ah eut des problèmes avec une fille qui avait insulté ses grands-parents de « vieux séniles ». Même si elle ne leur donnait pas toujours raison, elle les défendit et cela tourna à la bagarre. Elle fut convoquée dans le bureau des directeurs avec ses aïeux, qui s'indignèrent de l'attitude de l'adolescente. Elle fut hors d'elle quand ils se présentèrent comme ses parents et elle leur hurla dessus : « Vous n'êtes pas mes parents ! Arrêtez de vouloir nous faire passer pour une famille modèle ! Ma mère est à l'étranger pour son travail et vous avez ma garde ici, point ! ». Quoiqu'il en soit, elle fut renvoyée du collège, malgré ses résultats plus que corrects. Néanmoins, ils n'eurent pas de mal à la réinscrire ailleurs, son dossier scolaire étant assez valorisant pour cela. Monsieur et Madame Choi se calmèrent alors et comprirent qu'ils avaient été bien trop loin avec leur fille et leur petite-fille, aussi trouvèrent-ils le moyen d'inviter plus souvent la mère de Bi Ah pour qu'elle puisse voir sa fille. Celle-ci apprécia le geste et put repartir sur de bonnes bases avec eux, même si ses fantaisies de look ne lui passèrent pas. Ils apprirent également à l'accepter telle qu'elle était et tout redevint calme dans la famille.

Seulement, il y avait une chose que Mademoiselle Choi n'avait pas osé dire à sa famille. En effet, alors que Bi Ah avait à l'époque six ans, elle avait rencontré quelqu'un et en était tombée amoureuse. Un an plus tard, elle avait donné vie à une seconde petite fille mais avait décidé de ne pas l'annoncer à ses parents ni à Bi Ah, craignant leurs réactions. Finalement, elle et son compagnon avaient décidé de se marier et pour cela, il fallait annoncer la nouvelle cachée à la famille de la jeune femme, alors âgée de 35 ans. Bi Ah ne fut pas celle qui fut tellement choquée : à vrai dire, elle avait été donnée de savoir jusque-là que sa mère était restée seule, et apprendre qu'elle avait enfin trouvé quelqu'un lui réchauffait le cœur. Et puis elle avait une petite sœur ! Elle accueillit cette dernière toute joyeuse et l'emmena jouer avec elle dans sa chambre, sachant que les vieux allaient faire la morale à leur maman. Elle sympathisa rapidement avec elle, malgré la nature timide de sa demi-sœur mais elles devinrent vite complices. Malheureusement, elles ne purent pas se voir beaucoup car elle vivait avec le couple en Espagne, même si chacune de leurs retrouvailles était marquée par un bonheur hors du commun. Finalement, les grands-parents comprirent la décision de leur fille et tout le monde vint au mariage. Cela ne manqua d'ailleurs pas de donner à la jeune fille des rêves de conte de fée malgré sa nature franche et un peu grande gueule.

C'est au lycée que Bi Ah commença à écrire et à écrire beaucoup, si bien que la famille pensa qu'elle allait devenir écrivain. Mais ce n'était pas des romans que la jeune fille écrivait, c'était alors des poèmes, qu'elle mettait même en musique. Elle avait appris à jouer de la guitare à dix ans et du piano à quatorze ans. Il lui sembla donc que faire de ses écrits des chansons était bien mieux et plus amusant. Elle connut également le grand amour à ses 17 ans avec un jeune homme aussi passionné qu'elle par la musique et le courant passa très bien. Leur jolie histoire résista même à la célébrité qu'obtint son petit-ami, qui devint alors une idole. De son côté, la jeune femme se débrouilla pour devenir parolière et compositrice à la New Generation, une agence de stars qui fonctionnait plutôt très bien. Tout allait pour le mieux, ils avaient de quoi avoir chacun leur petit logis, car compte tenu de la situation de la star, il était risqué de vivre ensemble. Elle comprenait, elle ne demandait rien de plus que de pouvoir le voir et vivre en parfaite harmonie avec lui. Seulement la belle romance prit fin au moment où elle tomba enceinte peu avant ses 24 ans. Quelle joie elle avait ressenti ! Un bébé ! La parfaite concrétisation de leur amour était arrivée ! Elle aurait ce que sa mère n'avait vu obtenir et son enfant aurait deux parents comme elle l'avait toujours rêvé – même si son beau-père était adorable, cela ne pouvait remplaçait un père.

Quelle ne fut pas sa désillusion quand le père en question fut horrifié par la nouvelle au point de la quitter et de ne pas reconnaître l'enfant. Le cœur brisé, Bi Ah décida de quand même garder le bébé : elle l'aimait, il n'avait rien fait de mal lui, et elle le voulait. Elle était suffisamment indépendante et responsable pour l'élever seule. Bien que sa mère l'ait mise en garde de par son expérience, elle resta sur ses positions : elle et son beau-père se manifestèrent comme étant prêts à lui venir en aide au cas où et en plus, ils avaient chacun trouvé du travail en Corée du Sud. La mère de Bi Ah ne voulut pas que sa fille fut condamnée à prendre la même décision douloureuse qu'elle et même la demi-sœur de cette dernière se proposa pour aider. Émue par tant d'attention, Bi Ah donna alors sans regret la vie à sa fille, Ri An, le 23 Mars 2011. Même si elle peine parfois entre son job et son rôle de maman, elle arrive quand même à joindre les deux bouts, bien qu'elle garde une rancune tenace contre son ex. Personne pour prendre le rôle de papa Ri An ?