Sang Won ne sait même plus comment il a fait pour arriver ici. Ses larmes ont séchés sur ses joues et il regarde bêtement son verre plein. N’allez pas croire qu’il fait parti de cette jeunesse dépravée qui vient se bourrer la gueule seule dans un bar pour oublier quoi que ce soit, même si effectivement son verre contient de l’alcool il n’est pas soûle. Le verre lui a été offert déjà, et s'il est ici c’est parce qu’un ami y travaille. Mais actuellement il lui manque une partie de la journée, il se souvient bien du matin mais à partir de là tout est vague jusqu’à maintenant. Il se rappelle d’une fille c’est sûrement pour ça qu’il est ici, parce qu’en revoyant son visage il termine presque son verre. Il refuse de se souvenir de la suite, il saute une partie, cette partie qui a laissé sur son épaule droite une marque pourpre. Putain c’était fort, y’avait quoi dans le verre ? Le reste est encore plus flou, mais c’est normal, c’est parce qu’il a vue So Jin et c’est pour ça d’ailleurs qu’il est comme ceci. Ça l’étonne même de percevoir aussi bien la réalité, d’habitude il vaut mieux éviter de décrire son état.

Il n’est pas tard heureusement, à peine vingt-heures, il ne devrait pas tarder à rentrer. Mais pourtant à chaque fois qu’il tente de descendre de son siège il sent les larmes remonter jusqu’à ses yeux et il se rassoit. Aujourd’hui encore il aura fait le tour de son rappé sous la douche et passé une partie de la matinée à rire. Tout le monde était plus ou moins content de le voir se réveiller du bon pied. Mais c’était assez étonnant qu’à aucun moment il ne fasse son petit coup de la lunatique. Sang Won était devenu une bombe à retardement, une bombe qui explose quand personne ne s’y attend. C’est donc le midi qu’il passe de la joie à la colère, ça a commencé avec un mec qui a pris le dernier yaourt au chocolat. Sang Won n’aime pas les coups du destin, style il ne reste plus qu’un yaourt au chocolat et paf le mec juste avant le prend. Puis il a fallu qu’un autre mec soit de mauvaise humeur pour qu’il se fritte avec. Là aussi c’était un coup du destin, l'agence était relativement calme et il a fallu que les deux seules personnes qui sont énervés s’assoient l’un à côté de l’autre et en plus ils ne pouvaient pas se voir en peinture en temps normal. Pas besoin de raconter la suite, y’a du yaourt au chocolat (devinez à qui il appartenait) qui a volé, des fourchettes qui se sont transformées en fléchettes et les chaises ont fait « cuicui ».Sang Won ne l’a pas supporté, vous voyez c’était sa journée « bonne attitude » et là, ce crétin avait tout cassé. En plus il lui avait fait un énorme bleu sur l’épaule.

La suite s’est déroulée comme toutes les autres, il a passé une heure à alterner pleures et envie de meurtre puis il a croisé So Jin. Il se lève encore une fois et se rassoit immédiatement, il devrait peut-être attendre que les larmes sur ses joues sèchent définitivement. Alors qu’il sent un regard posé sur son dos il s’interroge soudainement, il ne sait même plus comment est-ce qu’il est habillé… Un bref coup d’œil le rassure plus ou moins, un pantalon noir et un t-shirt blanc avec des converses, enfin ce n’est pas ça qui le rassure, non ce qui est bien c’est que par on ne sait quel miracle un pull épais est posé à côté de lui et que techniquement lui appartient. En fait il ne peut appartenir à personne d’autre, y’en a pas deux des pulls comme ça (et heureusement pour le monde de la mode). Un pull tellement énorme et digne du grand-père le plus démodé de tous les grand-pères qu’il est sûr de n’avoir aucun problème sur le chemin du retour. Et la seule raison pour laquelle il garde ce truc c’est parce qu’un ami lui a offert pour déconner.

So Jin était en train de se préparer tranquillement dans sa chambre, à chercher ce qu’elle allait pouvoir porter pour sa sortie nocturne avec une vieille amie d’enfance qu’elle n’avait pas revu depuis un moment. Les filles du groupe avaient déjà quelque chose de prévu de leur côté, alors il fallait avouer que ça tombait plutôt bien.

Il en faisait pas très froid dehors, et bien sûr, à l’approche des beaux jours, Sojin aimait ressortir ses tenues préférées qui s’inscrivaient toujours dans ses styles vestimentaires. Preppy ou rétro, elle mettait de tout. Mais ce soir, elle avait opté finalement pour un haut à rayures style marin manches ¾ qui lui allait un peu grand, par-dessus un simple jean slim d’une couleur bleu foncé, avec à ses pieds, une adorable paire de baskets Temps des Cerises de couleur bleu marine, que son père avait fait venir de France exprès pour ses 18 ans. Une fois prête, elle prit son sac qu’elle enfila ses son épaule et quitta l’appartement du groupe, un peu en retard. Elle avait rendez-vous à 20h30 devant un restaurant, et forcément, elle n’y serait pas à temps.

Prenant le chemin un peu pressée, elle ne cessait de regarder l’heure à sa montre, pensant aux différents scénarios possibles. Son amie allait la ratatiner, parce que pour des retrouvailles et un moment attendu depuis si longtemps, arriver en retard, ça la fout mal comme on dit. Et puis elle avait raison, Sojin n’était jamais à l’heure, peu importe où elle allait. C’était une maladie.

La jeune brunette ne savait pas trop si elle avait pris la bonne direction, elle avait un doute sur le nom du restaurant, mais elle n’avait pas prix la peine de revérifier sur son téléphone. Non, au lieu de ça, elle marchait en regardant quand même les vitrines des boutiques devant lesquelles elle passait, au caso ù elle repérait un article qui lui plaisait, un must-have de la saison. Elle était à la recherche d’une jolie paire de chaussures pour l’été, alors elle scrutait du regard toutes les boutiques, quitte à même s’y arrêter une minute histoire de regarder dans tous les coins. Pourquoi cette insistance pour ces chaussures ? Parce qu’elle avait oublié toutes ses chaussures d’été chez son père et forcément, hors de question d’y retourner pour aller les chercher. Il manquait plus qu’elle affronte à nouveau ce grincheux de la vie pour une paire de chaussure. Il l’avait déjà bien gonflé la dernière fois qu’elle l’avait vu.

Sans s’en rendre compte, Sojin avait déjà perdu 30 minutes. Il était bientôt 21h quand elle réalisa sa faute. Et bien sûr, son amie l’avait bombardé d’appels. Elle devait s’inquiéter. C’était inutile en fait, So Jin n’ira pas à ce rendez-vous. Parce qu’elle a trouvé quelqu’un d’autre.

En passant devant un bar de rue assez grand, elle aperçut une silhouette qui lui était familière. Bien plus que familière. Des épaules carrées dans un corps moyennement grand, des cheveux noirs corbeaux et malheureusement une mine triste, abattue. Aussitôt, elle s’arrêta et le regarda un instant. Elle se demandait si elle devait aller voir Sang Won ou si elle devait juste tracer et vite rejoindre sa copine. Mais elle n’en avait plus envie, maintenant qu’elle l’avait vu, et qu’il était seul.

Ce mec, c’était tout pour elle. Ils ne sortaient pas ensemble, mais il était comme son meilleur ami dans le corps d’un homme qu’elle a aimé plus que quiconque. Et qu’elle aime encore aujourd’hui. Son âme de gamine avait été complètement marqué par ce personnage qu’il était. Bien qu’ils n’avaient presque rien en commun, il lui avait permis plein de choses, et il l’avait aussi empêché de faire beaucoup de choses. Aussi longtemps qu’il a pu el faire, il l’a empêché de partir trop tôt de Busan, et ainsi de ne pas donner naissance à leur histoire.

Dans tous les cas, ça s’est terminé tragiquement, et elle est quand même partie, elle lui a filé entre les doigts. Ce soir, c’était le moment ou jamais de pouvoir parler avec lui de ça. Même s’ils se croisaient dans les couloirs de l’agence, elle n’avait jamais eu l’occasion de se retrouver seule avec lui. Alors oui, son rendez-vous avec son amie allait être annulé. Elle sortit son téléphone de la poche et composa le numéro de la concernée, se dirigeant vers la porte d’entrée du lieu public. Quand son amie décrocha, Sojin poussa la porte du bar et se dirigea automatiquement vers Sang Won, qui lui tournait le dos, entamant la conversation avec une excuse bidon. Elle dit quelques mots, rien de plus, avant de raccrocher et de regarder le jeune homme un moment. Un regard triste, comme si elle était aussi triste que lui à ce moment précis, puis elle poussa un soupir discret.

Alors, sans rien dire, elle posa son sac sur la chaise à côté de lui et se pencha doucement par-dessus lui pour passer un bras autour de lui, pour venir déposer un simple bisou sur sa joue, comme si c’était la chose la plus naturelle du monde. Son esprit enfantin la rattrapait à chaque fois qu’elle était avec lui; elle avait besoin de se sentir près de lui physiquement, même si ce geste lui était interdit en temps normal.

Elle retira son bras et se détacha de lui pour venir s’assoir en face de lui. Elle était prête, elle se sentait prête de la tête aux pieds à affronter une conversation, une possible vérité qui lui ferait mal. Elle ne s’était d’ailleurs même pas maquillé, d’abord parce qu’elle est plus jolies au naturel, ensuite parce que le maquillage et les larmes, ça ne va pas ensemble. Je plaisante, elle n’avait pas prévu ça, elle avait juste eu la flemme de se maquiller. Mais peut-être qu’au final, le destin avait bien fait les choses. Parce que ce soir, face à Sang Won, elle allait finir par pleurer comme une petite Madeleine. C’était certain. Pas parce qu’il allait lui dire des choses méchantes, mais parce qu’elle était sensible à leur histoire. Se rappeler de leur passé, ça ne la faisait jamais sourire.

« Ca va ? » elle ne savait pas quoi dire, à vrai dire, elle était tellement honteuse de poser une telle question qu’elle avait penché la tête pour cacher ses joues rosées et son air confus. « Je veux dire… Pourquoi t’es en train de boire ? » il ne la rembarrerait sûrement pas. Elle savait qu’elle était importante pour lui. Mais elle n’était bonne qu’à jouer l’amie présente pour lui, et pas pour faire du rentre dedans et l’embrasser devant tout le monde en lui disant que maintenant, ils finiraient leurs vies ensemble.

Sang Won dépose le pull sur ses genoux et fait tourner le verre entre sa main, il hésite à le finir, parce que c’est vachement fort ce truc. C’est quoi d’ailleurs ? On lui a dit mais il a oublié, ça devient une habitude aujourd’hui, d’oublier. Quelqu’un s’assoit en face de lui, à peine est-elle assise qu’il tourne la tête. Un haut à rayures style marin manches ¾, il aime bien les hauts comme ceci, ça donne la classe. Ses yeux marrons glissent lentement le long du corps de la jeune femme, elle porte un jean slim bleu foncé, une femme simple et classe. C’est bête mais on en voit de moins en moins, il n’en connait qu’une comme ça d’ailleurs. Ses chaussures sont bien… Sang Won redresse vivement la tête, ses yeux s’agrandissent à la vue de la jeune femme au haut style marin. Ahn So Jin. Alors là. S'il pouvait tomber sur le cul il serait déjà par terre, c’était bien la dernière personne qu’elle pensait rencontrer ici. Et ça se lit clairement sur son visage, bouche entre-ouverte et les yeux ronds il ne peut pas mieux exprimer son étonnement. « Bah... »

C’est tout ce qu’il est en mesure de dire. Sang Won se sent mal, ce n’est pas qu’il n’est pas content de la voir, c’est surtout qu’il n’est ni au bon endroit ni dans le bon état pour faire face à la femme de sa vie. Non vraiment, un bar, les joues mouillées, encore un peu défoncé, et elle avait sûrement entendu parler de la " bagarre " à l'agence même si c’est assez courant, c’était loin d’être les bonnes conditions pour voir la jeune demoiselle. Certes leur relation c’était améliorée, par rapport au début où il était très distant avec elle, comme à peu près tous les anciens couples, il y avait eu du changement, mais c’était quand même un peu limite comme situation au jour d'aujourd'hui puisqu'il ne veux pas être son ami, mais il veux être son amoureux. « Je suis triste... »

Son regard se dépose sur le verre qu’il tient. Sang Won culpabilise, il se sent bête d’être dans cet état face à elle, défoncé et avec un verre d’alcool. Super l’image. Pourquoi est-ce qu’il culpabilise devant elle ? La logique de notre jeune homme n’est peut-être pas la bonne quand il s’agit de résoudre des problèmes, et alors que deux solution s’offrent à lui, pousser discrètement le verre ou l’ignorer, il choisit une tout autre option. Il boit tout ce qu’il restait d’une traite. Plus d’alcool, problème résolu. « Je suis désolé... » Sa voix se brise sur la fin de sa phrase, il va sûrement encore, pleurer.

Elle n’avait jamais honte de ses gestes peut être trop affectifs et si soudains. Heureusement, elle n’agissait de la sorte qu’avec les personnes qu’elle aimait vraiment. Et par ce bisou, elle espérait aussi voir apparaître sur les lèvres de Sang Won un sourire qui en dirait long. Au lieu de ça, non. Elle ne vit rien, pas même un soupçon de regard attendrissant. LE fait est que le rappeur était dans un sale état. Il avait l’air abattu, détruit et il semblait noyer son chagrin dans l’alcool. Une chose que So Jin avait en horreur malheureusement. Et dans ses mauvais jours, elle prenait les verres et les vidait sur les personnes. Mais ce soir-là, elle était tellement contente de le voir et de se retrouver seule face à lui qu’elle ne gâcherait ce moment pour rien au monde.

Elle croisa les jambes doucement en lançant un regard vers le barman qui les regardait, tout en essuyant la vaisselle qu’il venait de laver. Il les inspectait d’un œil méfiant, comme si les deux jeunes rookies étaient des truands.

« Je suis triste... » lança le rappeur d’un ton un peu las. Elle ne quittait pas du regard ce verre qu’il avait entre les mains et encore à moitié plein. Elle sentait sa tristesse peut-être plus que l’alcool qu’il avait ingurgité, et elle avait envie de l’aider. Même si l’alcool la répugnait, elle savait qu’il avait besoin d’aide. Par contre, elle doutait fortement sur l’identité de la personne qui le sortirait de là. Elle se persuadait souvent qu’elle n’était pas la bonne personne pour lui, parce qu’elle lui avait brisé le cœur sans le vouloir en prenant la poudre d’escampette pour quitter Busan. C’était pas une amourette d’adolescents qui les avait réuni, c’était un amour tellement fort, qu’il avait fini par les détruire.

So Jin pouvait encore voir les effets nocifs de leur histoire d’amour qui n’a jamais vu le jour. Elle les voyait là, directement sous ses yeux en voyant Sang Won s’envoyer des verres d’alcool. D’ailleurs, il en profita pour finir celui qu’il avait entre les mains d’un trait. Elle lui lança un regard de déception en tournant légèrement la tête sur la gauche. Il l’a senti, elle n’a pas aimé ce geste. « Je suis désolé... »

Elle ne comprenait pas vraiment pourquoi il s’excusait, si ce n’est pour avoir fini le verre d’alcool au lieu de le repousser. Le connaissant, elle savait que cette phrase avait un sens beaucoup plus profond, plus caché, enfoui dans son cœur. « Pourquoi tu t’excuses ? » elle demanda ça simplement, en baissant la tête vers le bas. Du bout de son index, elle commença à dessiner nerveusement toutes sortes de formes invisibles sur la table, réfléchissant sérieusement à ce qu’il voulait lui dire. Bien sûr, elle avait entendu parler de la bagarre et ça ne l’étonnait plus que Sang won soit mêlé à ce genre d’histoire. La brunette leva alors les yeux vers les quelques égratignures visibles sur son visage. « Tu pleures parce que tu t’es battu ? » elle marqua une pause, pendant qu’elle guettait une première larme sur les joues du garçon. « Tu sais, c’est pas la fin du monde… »
Qu’y-a-t-il de mieux que la douceur de So Jin pour se sortir de nos maux ?

« Tu sais, c’est pas la fin du monde… »

Ses paupières s’abaissent et laissent les larmes qui noyaient ses yeux marrons rouler sur ses joues. Il regarde le bois qui recouvre le comptoir sans oser lever le regard, pourtant ses paroles l’ont marqué, effectivement ce n'est pas la fin du monde.

« Ce n'est pas à cause de l'autre puisque j'en ai rien à foutre de lui et tu sais très bien que je dis la vérité.. »

Enfin, Sang Won était de mauvaise humeur aussi. C’était à cause du mec. Aujourd’hui il devait être de bonne humeur, mais fallait qu’il pse bagarre pour des conneries. C’est comme si les gens s’étaient ligués contre lui, laisser la place à côté du mec de mauvaise humeur. Soupire.

« Tu sais il y a des jours où j'aimerais être au collège.. »

Sa main vient dégager les larmes gênant son regard, il se sent désolé, désolé de lui offrir cette image-là de lui, comme s'il ne voulait pas la décevoir à ce point. Le jeune homme dégage le verre sur le côté, faut mettre ce truc hors de vue, ça fait perdre la raison ces choses-là. Il n’aurait pas dû finir le verre mais on mettra ça sur le coup de la drogue. Ses larmes s’arrêtent, au moins il pourra mettre les yeux rouges sur le compte des pleurs, ça commence à faire beaucoup de fausses excuses.

Si un point d’exclamation pouvait apparaitre à côté de notre asiatique son état actuel serait parfaitement retranscrit. Ses yeux se lèvent lentement et glisse de son épaule au visage de la jeune demoiselle. Elle s’inquiète ? Il y a pas trois milles personnes qui s’inquiètent de votre épaule quand vous avez déclenché une bagarre et qu’on vous retrouve dans un bar. Sa mère par exemple n’en aurait rien à foutre.

« Tu ne pourras pas dire que je te cache des choses.. »

Le jeune homme laisse le silence s’installer pendant qu’il regarde la demoiselle puis comme il ne trouvait pas quoi dire, il lui demande.

« Sinon tu m'aimes toujours ? ... »

Ahn So Jin n’est pas comme lui, à péter des plombs pour un oui ou pour un non, à faire étalage de ses humeurs, non, elle a le sang-froid, du moins face à lui. Parce qu’il en connait qui à sa place auraient jeté l’éponge, et lui avec. Sang Won voudrait détourner la conversation, mais son esprit shooté l’empêche de le faire subtilement, il commence à dire n’importe quoi.

« Ah... J'aime pas être comme ça, je fais vraiment n'importe quoi. »

Ilse tait. D’accord, il s’enfonce. Déjà on ne dit pas comme ça si elle aime encore la personne, peu importe qu’on l’aime bien ou non. Andouille.

« Oublie ce que je dis.. »

Non, il n'est pas du tout chiant notre jeune asiatique.

Bien sûr, So Jin aurait peut-être préféré le voir dans un autre état que celui-ci. Parce qu’en temps normal, Sang Won était ce gamin qui avait toujours le sourire, qui trouvait toujours les bons mots pour vous mettre à l’aise.
Là, c’était tellement l’opposé de ce qu’il était d’habitude qu’elle ne comprenait plus. Et plus elle y réfléchissait, plus elle se sentait loin de l’époque où ils avaient failli sortir ensemble, loin de cette fille qu’elle était, loin de ces jeunes ados qu’ils étaient. A cette simple pensée, un sentiment de mélancolie s’empara d’elle mais elle préféra l’ignorer pour ne pas elle aussi sombrer dans une sorte de mini dépression qu’elle finirait par arroser d’alcool.

« Tu sais il y a des jours où j'aimerais être au collège.. »

En entendant ça, Sojin tourna aussitôt la tête pour une raison précise : elle n’aimait pas trop se rappeler de ce qu’ils avaient fait. Elle voulait mettre de côté les conséquences de leurs actes, et ainsi, la réputation qui lui avait collé à la peau pendant longtemps. Elle voulait tout oublier sauf lui, parce qu’il avait fait partie de sa vie et il en avait été une partie importante.
Le collège, pour elle, c’était pire que tout au final. Les enfants, à cet âge, sont ingrats. Ils ne réalisent pas le mal qu’ils sont les uns aux autres.

« N’y pense plus… S’il te plait… » lança-t-elle d’un ton calme et reposant, alors qu’au fond, elle commençait peu à peu à angoisser. On pouvait le voir à ses doigts qui se mirent à danser sur la table où ils étaient assis. Du bout de ses ongles, elle tapota le bois de la table, provoquant ainsi un bruit très stressant. Quand elle réalisa que ce qu’elle faisait n’arrangeait personne, elle stoppa brutalement, mais le silence était bien trop lourd pour elle.

C’était méchant, cette réponse qu’elle avait lancé. Mais en même temps, elle ne pouvait rien dire d’autre tant elle avait été marqué à jamais par cet événement. Elle avait ruiné tous ses espoirs d’entente avec les filles, piétiné sa dignité, et de ce fait, son père lui avait tiré une paire de gifles devant les parents de l’ex copine de Sang Won. La totale, de quoi vouloir se cacher dans un trou de souris et ne plus en sortir. Et ce n’était rien contre Sang Won… Si seulement elle pouvait lui dire tout ce qu’elle avait sur le cœur.

« Sinon tu m'aimes toujours ? ... »

Aussitôt, elle posa les yeux sur lui. Elle lui lança un regard perplexe, perdu, choqué à la fois. C’était tout lui, ça. A poser des questions gênantes d’un coup comme ça pour essayer de combler les blancs insupportables à chaque fois. Mais ça la faisait sourire au fond, parce qu’elle trouvait ça innocent et mignon. Ce garçon… Décidément. Il était trop. Trop pour elle.

« Ah... J'aime pas être comme ça, je fais vraiment n'importe quoi. » Elle rétorqua. « Non ça va, c’est rien. » elle secoua la tête avant d’afficher un sourire gêné qui disparut presque aussitôt.
« Oublie ce que je dis.. » Elle le regarda un moment, à la recherche d’une multitude de solutions pour trouver une issue à cette conversation. Oublier ce qu'il avait dit? Impossible. Et il évitait son regard, sûrement trop gêné.

Décidée, elle prit le verre et se leva pour aller le poser sur le comptoir. Elle revint à la table et reprit place face à lui, un peu plus dynamique que quand elle était arrivée.

« Tu veux pas qu’on parte… ? C’est pas le bon lieu pour parler de ce genre de chose. » Elle se mordit la lèvre inférieure. « Tu dois prendre l’air, tu as trop bu. » Elle se leva de sa chaise, prit son sac et alla payer les verres qu’il avait pris, pour ne pas qu’il se dispute aussi avec le barman quand celui-ci lui donnerait la note de ses commandes. Une fois ça de fait, elle revint vers le jeune rappeur et, quand il fut prêt, ils quittèrent les lieux. Rien de tel que l’air frais de la nuit pour décuver petit à petit, non ?

« … Tu penses que je suis passée à autre chose ? » Elle voulait revenir à la question qu'il lui avait posé un peu avant. Pour elle, il était évident qu’il avait perdu tout espoir de réconciliation. Pourtant ce n’était pas le cas, elle le voulait toujours, avec ses défauts et ses sauts d’humeur.

Il se passait toujours pas mal de choses à l'agence, Sang Won y était habitué. Les conflits éclataient de façon régulières, plus violents les uns que les autres. C'était regrettable, mais le jeune homme savait bien ce que c'était. Ça ne le surprenait plus depuis longtemps et pourtant, il aspirait toujours à minimiser la choses. Il était loin d'avoir baisser les bras, et s'il n'avait rien d'un magicien, il espérait pouvoir changer les mœurs d'année en année. Il savait que l'autorité ne l'aiderait en rien, c'est pourquoi il n'adoptait pas du tout le même genre de méthodes que les autres puisqu'il est impulsif. Il avait eu beau les débriefer à ce sujet, rien n'y faisait. Certains, plus volontaire, envoyaient simplement un coup de poing puis le laisser se débrouiller avec les cas désespérés. Mais pour lui, il n'en existait aucun, si ces jeunes reniait toute forme d'autorité, il y avait forcément une raison, son but était de la trouver, et de réparer comme il pouvait ce qui avait pu les conduire sur ce chemin là. Une quête sans fin, il l'avouait parfaitement. Son supérieur lui même le prenait pour un fou. Lui, il pensait être celui qui avait le plus la tête sur les épaules. Comme quoi...Rien n'était simple. Aussi, il soupira avant de reprendre.

« Partons.. »

Ses yeux semblaient s’être desséchés pour un bon moment et il pouvait sentir son cœur se calmer, perdant son rythme effréné qui le faisait bondir sans cesse. C’était reposant, reposant d'avoir quelqu'un en face de lui, reposant de discuter avec quelqu’un comme So Jin. Sang Won était loin l’image de la jeune femme, le jeune rappeur se le rappelait quelques fois histoire de ne pas faire de bourde non plus mais ce n’était déjà plus une simple meilleure amie du collège.
L'heure était venu de dire adieu aux larmes et à ce barman si surpris. Il était temps pour eux deux de prendre la route d'un autre endroit. Certes, Sang Won avait passé une soirée mouvementée accoudé à ce bar avec plusieurs verres, mais il ne le regrettait pas. Il préférait cent fois être avec So Jin , même rien qu'un peu. Parce que oui, même si le jeune brun semblait parfois se foutre de tout, ce n'était pas le cas. Rien n'était gagné c'est bien vrai, il en avait conscience, mais en poussant la porte de ce bar pour retrouver le calme de la rue et la fraicheur de la nuit, il était profondément heureux.

Ils ne parlèrent pas beaucoup sur le chemin. Sang Won pour une fois, il ne chercha même pas à dégrader son statut. Il n'avait qu'à se taire pour une fois. Il y a toujours cette envie de faire croire qu’on est invincible, d’essayer de convaincre chaque personnes jusqu’à se convaincre soit-même. prochaine fois, ça ne sera pas avec un mot ou dans un bar entrain de pleurer. Il repartait plus léger, il était loin le mec de la fameuse bagarre, maintenant il comprenait que ce n’était pas grave.

« Oui, je le pense.. T'as du avoir eu cet oublie de toute façon.. » Il soupire, évidement le jeune homme à raison, après tout il a le vécu, l’expérience, alors oui il peut se permettre de parler comme ceci. Cela n’empêche qu’il a du mal à se laisser convaincre, on est tête de mule ou on ne l’est pas. C’est presque malpoli de le dire comme ça. Sang Won est souvent malpoli, sa mère le lui rappelait souvent, en fait sa mère lui rappelait souvent ses défauts. C’était sûrement dans le but que le jeune homme se remette en question, apprenne de ses erreurs, mais c’est clairement l’effet inverse qui s’est produit lorsque l’on voit ce qu’est devenue Sang Won à l’heure actuelle. Avant le jeune rappeur n’était qu’un petit pétard, le truc qui fait plus de bruit qu’autre chose, maintenant Sang Won est une bombe à retardement ; et personne ne se gêne pour raccourcir la mèche.

« Oui, je le pense.. T'as du avoir eu cet oublie de toute façon.. »

Quand il lui répondit ça, So Jin ne put s’empêcher de fermer les yeux, toujours en marchant. Ils n’avaient pas de destination, ils devaient juste marcher un peu, prendre l’air, surtout lui. Il était ivre, il avait besoin d’air frais, et dans un sens, So Jin savait ce qu’il vivait.

Le problème, c’est que plus les minutes passaient, plus elle regrettait de s’être arrêtée pour lui. Elle se sentait la seule à faire des efforts pour réparer les morceaux brisés de leur histoire. Elle se donnait à fond pour que les deux arrivent à avoir une relation, pour qu’ils puissent enfin être ensemble, comme un couple normal, si on mettait de côté leurs statuts d’idoles. Mais lui… Lui, il détruisait tout ce qu’elle se tuait à fonder. Tous les espoirs qu’elle avait, il soufflait dessus et les faisait s’effondrer comme un château de cartes. Soso se sentait plus déçue que jamais, et au final, elle allait sûrement abandonner l’idée de sortir avec lui. Et si, au final, il ne voulait plus d’elle ?

Elle ne voulait plus parler, elle voulait se faire discrète. En fait, elle était en colère, elle bouillonnait de l’intérieur, et si elle ne se retenait pas, elle se mettrait devant lui et le giflerait pour avoir dit une chose aussi blessante que celle-ci.

Après son départ (précipité) de Busan, la brunette avait souffert. C’était peut-être la période où elle avait le plus souffert dans sa vie. Son père refusait qu’elle ait un téléphone, encore moins si c’était pour essayer de joindre Sang Won. Elle avait pensé à lui pratiquement tout le temps durant les mois qui ont suivi. En cours, elle pensait à lui. Chez elle, elle pensait à lui. Chaque geste qu’elle faisait le ramenait à lui, à s’imaginer comment seraient les choses si sa petite amie n’avait pas fait une crise de jalousie et n’était pas allée tout déballer au père de So Jin. Ils auraient été ensemble, heureux et amoureux. C’était ce qu’elle se disait. Et quand elle pensait qu’il était toujours avec cette pimbêche de première qui refusait de lui laisser un peu de liberté, elle se rendait malade. Elle ne voulait plus se nourrir, elle voulait juste Sang Won. Pour soigner tous ses maux. Pour soigner sa folie progressive qui l’ensevelissait doucement.

Elle était, cependant, trop atteinte pour ne rien dire, ne rien faire. Alors aussitôt, elle se plaça face à Sang Won et lui lança un regard menaçant, colérique, pour lui faire comprendre clairement qu’il avait fait quelque chose de mal. Elle serra le poing droit en baissant la tête, ses longs cheveux noirs passant par-dessus ses épaules. Doucement, elle vint mettre un petit coup sur le torse de Sang Won, tandis qu’elle se mordit la lèvre pour retenir tout débordement d’émotion. « Tu… » Elle s’arrêta, elle n’était pas très sûr de ce qu’elle allait dire. Elle avait 1000 façons de l’engueuler, au fond. « Tu te rends compte de ce que tu dis, au moins ? » Elle releva les yeux vers lui, des yeux humides, soit dit en passant. « T’es décevant, de jour en jour. J’aurais même pas dû m’arrêter pour toi. » Quand elle était énervée, elle débitait, elle disait les choses un peu trop vite et sans réfléchir. C’était comme pour se venger.